Stage d’automne Equipe Espoir Midi Pyrénées FFCAM: 17/18 octobre 2015, Montrebei, Espagne
Romain, en bon adepte des pratiques d'auto-flagellation grimpistiques a le projet de trainer 5 d'entre nous (Cocotte, Max, Nico, Jéjé et Simon) dans les grandes voies de la paroi d’Aragonà Montrebei. Les lignes visées sont «Alucinosis»et «Jim Beam», environ 550m chacune, du rocher allant de très bon à bien pourave, des pas d'artifs, des parois déjà très verticales qui se redressent encore, une nuit dans la face, un vide qui se creuse et une marche de retour qui se mérite.
Samedi ~5h: Réveil
Arrivés la veille vers minuit au parking, grâce à la conscience professionnelle des patrons de certains et après un repas là où «ça coûte pas plus cher de bien manger»,nous déjeunons rapidement pour attaquer avant 6h l'approche vers la paroi d’Aragon.
~8h30: Départ
L'assaut est donné sur la première longueur commune aux deux voies. C'est le début d'une première longue journée.
Jéjé, Nico et Rom' partent droit dans les toits d'Alucinosis tandis que nous partons à droite, avec Cocotte et Max, dans la ligne moins directe de Jim Beam. Nous nous retrouverons tard le soir même sur la vire de bivouac au milieu de la paroi.
Récit « D’Alucinosis » par Jérémy :
Dès les premières longueurs nous prenons de l'avancé en passant deux gros toits qui se franchissent au plus raide en quelques pas d'artif, la ligne n'est pas très logique mais l'ambiance y est bien présente. Nous grimpons les longueurs d'artif en technique américaine ce qui nous permet de bien gérer le temps et nous arrivons à la vire d' Existentialisme vers 17h30. Rom repart dans une courte longueur d'A2 tandis que je prépare le bivouac. Encore le temps de faire une dernière longueur de nuit et nous fixons la corde stat pour demain matin. Retour sur la vire pour une bonne bière et un bon repas chaud, l'autre cordée arriva un peu plus tard au moment où nous nous glissons dans les duvets.
Dimanche :
Réveil 5h, après une nuit un peu mouillée, c'est avec énergie que nous attaquons L9 une belle longueur d'artif qui demande un peu de boulot, s'en suit 2 belles longueurs de libre que nous gravissons assez rapidement entre fissures et dièdres. Je m'engage ensuite dans une grande longueur d'A1+ qui me demandera plus de boulot que je ne le pensais, surtout quand, dès le début de la longueur un friend gicle et c'est le retour plusieurs mètres sous le relais. On finira par venir à bout de cette longueur après pas mal d'heures d'acharnement entre les "t'en chies connard ?" de Romain et les Punch line de Nico au dépitonnage. Et c'est à nouveau de nuit que nous terminons les 2 dernières longueurs de libre de la voie, non sans accros car je me fais emboutir le casque par un gros bloc décroché lors du hissage des sacs. Nous retrouvons nos compères à 22h aussi heureux que nous de sortir enfin de cette aventure, pour une longue descente vers les voitures.
Récit de «Jim Beam»par Simon :
Les premières longueurs en rocher médiocre sont grimpées en alternant libre et artif jusqu'à R4. L5 est la première longueur dure nécessitant un bon talent d'artificier et un bon niveau de grimpe. C'est son Excellence de l'Alpinisme National, alias Cocotte qui nous déverrouille ce passage avec classe puissance et maîtrise. On a faim, il doit être 14h, peut-être 18, le temps ne suit pas son cours habituel sur ces parois raides. La maitrise du hissage des deux sacs commence à venir, la remontée à la jumar plein gaz aussi, on avance et c'est Max qui se charge de quasi-libérer L6, donnée pour A2+, soit disant que les trous de pitons font de bonnes réglettes et que les mouv' d'épaule sont magnifiques...
La nuit tombe, on se demande à quel moment le temps a pu s'écouler aussi rapidement. L'ambiance est particulière dans cette face en pleine nuit noire, surtout quand les trois frontales sont au pied de la longueur et que le leader construit son relai au radar et lance d'une voix plein de défi «Allez-y, mais un par un!». Non, je préfère dormir en équilibre précaire avec un quart de fesse posé sur une écaille coupante que de me lancer plein gaz là-dessus. Passé le doute, on réfléchit et on trouve le moyen de faire monter une frontale jusqu'au relai supérieur. Une fois certifié aux normes, on se lance dessus, il reste encore une longueur avant la vire, on y parviendra peu avant minuit...
~00h: La vire
Bon ce n’est pas non plus le Ritz, seuls quelques emplacements présentent une plateforme horizontale, mais ça ira, on n'est pas là pour se reposer! On retrouve les Alucinés, bien contents de leur journée, ils ont été tellement rapides qu'ils ont pu fixer quelques longueurs au-dessus de la vire! Une bière, une soupe et une purée plus tard, c'est repos, reveil fixé à 6h!
Dimanche 6h30:Levé face au vide!
Il a plu,mais il n’a pas fait froid. Ça pique, mais ça fait du bien d'être là, on a un peu gratté sur le réveil, on déjeune et on repart. Une première longueur en traversée donne le thème de la journée: plein gaz! A la sortie du duvet, ça décrasse... Dans la cordée, les rôles sont maintenant fixés, à qui grimpe, à qui déséquipe, à qui remonte à la jumar, on a l'impression d'avancer plus vite qu'hier, et tant mieux: c'est 10 longueurs qu'il va falloir négocier.
La vitesse, c'est relatif. Dans ce dièdre parfait, le vide se creuse, la fatigue se fait sentir, les relais demandent toujours autant de travail, il faut toujours hisser les sacs même si ils ont bien perdu du poids. A deux longueurs du sommet, une vire, une vraie, une où on pourrait stationner une twingo et accessoirement s’asseoir et se couper un peu du vide, il fait encore bien clair, la fin de la voie est plus facile, ça va sortir... mais pas de jour!
Dimanche 20h30: Summit 1
Le temps a encore décidé de filer entre le petit dej et la tombée de la nuit. Les sacs sortent de la voie, les dernières bières triples belges sont vidées avec respect, le saucisson est tranché avec solennité, le fromage est découpé avec humilité, on avait la dalle et on avait soif.
Dimanche ~22h: Summit 2
Nico sort «d'Alucinosis»,on est tous en haut, malgré les frayeurs de Jéjé, tout le monde est arrivé sur le plateau! Pour l'instant on est encore content.
Lundi ~2h: Voitures!
Là on est moins content, c'est bon quand c'est long, c'est ça la paroi d’Aragon, du coup on a bien profité de la marche du retour, entre la bartasse dans les buis et la pause selfie de 20minutes du guidos-qui-recommence-20-fois-la-photo-parcequ'il-a-une-gueule-de-blaireau-dessus-et-ça-la-fout-mal-sur-mon-blog, l'arrivée aux voitures tient de l'instant de grâce. On mange et on boit, parce qu'on avait encore la dalle et qu'on avait encore soif, on bourre les bagnoles, et on se casse!
Lundi~6h: Toulouse enfin!
Un bon gros double tour de quadrant! On «commence à prendre goût à la soumission».
Merci Romain, Cocotte, Max, Nico et Jéjé. Çavalait le coup même si on en a c....!